Cofidis, anatomie d’une relégation douloureuse pour 2026 !
- Romain Bougourd

- 22 oct.
- 5 min de lecture
20e équipe UCI à l’issue du cycle 2023-2025, Cofidis devra redescendre à l’échelon inférieur, en Pro Team, pour 2026. Une descente du World Tour qui sonne comme un échec cuisant, qui a coûté la place de Cédric Vasseur. Comment les Nordistes en sont-ils arrivés là ? Est-ce pour autant une catastrophe ? Analyse.

« On est loin de la situation de 2022 [quand Cofidis jouait le maintien, ndlr], car on se bat pour être dans les 10 meilleures équipes, ce qui n’est plus du tout la même chose. » Ces mots sont ceux de Cédric Vasseur en septembre 2023, lorsque Cofidis venait de gagner deux étapes du Tour de France et était confortablement installée à la 12e place au classement UCI. Deux ans plus tard, cette déclaration est plus qu’obsolète : Vasseur n’est plus là, débarqué fin septembre pour faute de résultat, et Cofidis ne joue même plus le maintien, puisque les Nordistes sont officiellement relégués du World Tour. Une chute abrupte et la preuve que la régularité au haut niveau n’est pas chose aisée. Après une saison 2023 conclue à la 12e place pour ouvrir le nouveau cycle triennal UCI, Cofidis a enchainé deux exercices hors du top 18, pour échouer à la 20e place sur 3 ans, synonyme de relégation. Mais comment expliquer un tel déclassement ? Comment les Nordistes, qui enchainaient les grandes performances en 2023, qui ont obtenu une rallonge de budget, ont pu gâcher une si belle saison avec les deux suivantes ? Tentatives de réponse.
Une stratégie pas suffisamment axée sur la maximisation des points UCI
Le premier point à noter, selon nous, se trouve dans les choix de calendrier. Astana a parfaitement compris, dans son opération survie, que cela passait par des choix de calendrier très clairs : courses asiatiques ou africaines, analyse de la concurrence et impasse sur les grandes courses comme le Tour de France. C’est ainsi que la bande d’Alexandre Vinokourov est parvenue à scorer très tôt et beaucoup avec des coureurs relativement peu en vue. Cofidis a fait l’inverse : les Nordistes n’ont pas voulu changer leur calendrier habituel, privilégiant les courses françaises et belges où la concurrence est beaucoup plus intense. C’est en soit tout à leur honneur de vouloir se frotter aux meilleurs. Mais ne pas participer à la Maryland Classic ou au Tour de Langkawi, courses .Pro où se sont rendus TotalEnergies et Uno-X, qui ont raflé des centaines de points, est pour nous une erreur d’appréciation. Certes, Cofidis, en tant qu’équipe française, est plus ou moins tenue de participer aux épreuves en France. Mais l’urgence de la situation justifiait de faire quelques impasses pour assurer le maintien. Dans cette même logique, envoyer une grosse équipe sur la Vuelta n’était peut-être pas la meilleure des stratégies, lorsque l’on analyse la qualité du calendrier parallèle. Uno-X a empoché de nombreux points sur ces courses, quand les Nordistes n’ont pris que 112 points sur la Vuelta avec Coquard, Aniolkowski, Buchmann, Herrada ou Carr, qui auraient eu de plus belles opportunités sur d’autres courses. Le pari de cette composition était osé, il s’est trouvé être un échec complet, en plus de fatiguer des leaders sur lesquels le collectif comptait.
Dans la même verve, on peut parler d’une absence de calcul pour les points. Astana cette année mais aussi Arkea en 2022 avaient été maîtresse en la matière : si elles ne jouaient pas la gagne, elles jouaient les places d’honneur en mettant plusieurs coureurs dans le top 10, pour ainsi engranger des points. Et cette tactique, Vasseur l’a refusée. « Le mieux est de viser la victoire. Il ne faut pas rêver, sur le Tour de France, il y a très peu d'équipes qui sont capables de faire 2ème, 5ème et 7ème à chaque fois. […] On n'a pas un effectif aujourd'hui capable de mettre 3 coureurs dans le top 10 de chaque étape. Ça peut être envisageable sur certaines courses où on arrive au sprint, et peut-être qu'en fin de saison on le fera », avait-il déclaré à notre micro en juin. Mais c’était déjà sans doute trop tard.
Le mercato 2024 : plusieurs paris, beaucoup d’échecs
Deuxième raison de l’échec : le mercato. C’est un sujet assez clivant, en tout cas lors de l’annonce fin 2024 : certains y voyaient un mercato très prometteur, d’autres l’interprétaient comme un manque d’idées et des « panic buy ». Si Axel Aranburu est une réussite, rien que pour sa 3e place en Catalogne, mais aussi pour ses 1 167 points UCI. Sauf qu’il est bien le seul. Emmanuel Buchmann, malgré un niveau prometteur sur le Dauphiné, a été malchanceux par la suite et n’a pas obtenu de résultats probants sur le Tour ou la Vuelta. Simon Carr n’a couru que 24 fois mais n’a terminé que 7 courses sur 14. Quant à Dylan Teuns, il n’a jamais confirmé sa 2e place à Bessèges et n’a réalisé ensuite que 3 top 10… Bref, la plupart de ces paris ont été des échecs, alors qu’ils s’avançaient tous en leader dans leur profil. Et même parmi les autres leaders présents dans l’effectif, ils sont peu à avoir réussi leur saison. Malgré sa victoire en Australie, Bryan Coquard n’est pas parvenu à lever une nouvelle fois les bras en 2025. Jesus Herrada et Ion Izagirre n’ont pas tenu leur rang. La seule réelle satisfaction de la saison n’est autre que Milan Fretin, qui a franchi un vrai cap en termes de régularité, à 24 ans. Ses 1 130 points UCI en sont la preuve.
Cofidis victime d’une concurrence accrue
Un troisième point pourrait être le management de Cédric Vasseur. Celui-ci n’est pas le nôtre, mais différents articles publiés sur le sujet, et notamment celui de L’Equipe en mars dernier, remettent en cause le management du Nordiste. Nous ne disposons pas de preuves pour valider ou infirmer cet article, mais force est de constater qu’en tant que directeur de l’équipe, l’échec de la relégation lui impute, et qu’il ait été écarté montre que les actionnaires l’ont lâché, mécontents de ses résultats.
Enfin, comment ne pas évoquer tout simplement la concurrence et l’évolution du cyclisme moderne ? Avec un budget annuel de 25 M€ et le système fiscal français, Cofidis dispose d’un budget a priori confortable, dans les faits plutôt dans la moyenne basse du World Tour. Les budgets sont en augmentation perpétuelle, et 25 M€ en France ne valent pas 25 M€ aux Etats-Unis, en Suisse ou en Australie. Ce n’est pas assez, par exemple, pour conserver sa pépite Axel Zingle fin 2024. Bref, comme GFDJ, les Nordistes n’ont pas les armes pour lutter face aux super-teams sur le temps long, et c’est désormais en Pro Team qu’ils vont devoir se reconstruire. Et c’est peut-être un mal pour un bien. Tout d’abord parce que les actionnaires de l’équipe, le Crédit Mutuel (maison mère de Cofidis) a réitéré son soutien à la structure et à son nouveau directeur, Raphaël Jeune, en début de semaine. Ensuite, parce qu’avec la quasi-assurance d’être invitée sur toutes les courses WT majeures, Cofidis disposera d’un calendrier beaucoup plus souple et flexibles, et pourra mieux sélectionner ses courses, tout en évitant celles où elle a peu de chances. Rendez-vous dans 3 ans pour savoir si, oui ou non, Cofidis reviendra en World Tour comme Lotto et Premier Tech cette année. Et on parierait que oui. A suivre.








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