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David Gaudu - Groupama FDJ : "J'ai toujours préféré jouer le classement général "

En fin de stage en Espagne, David Gaudu nous a accordé un peu de temps après sa séance du jour. Très heureux et joyeux, le Français s'est exprimé sur ses difficultés depuis plusieurs saisons, à cause des chutes, sur son changement d'entraineur ou encore sur son rôle de grand frère au sein de la Groupama - FDJ. Entretien.


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A noter que nous n'avons pas pu parler de son calendrier et ses objectifs pour 2026, puisque celui-ci sera dévoilé lors de la présentation de l'équipe, le 9 janvier prochain.


Interview de David Gaudu - Groupama FDJ : "J'ai toujours préféré jouer le classement général "


Ta saison 2025 a été particulière. Tu avais très bien commencé, on avait retrouvé le Gaudu puncheur et grimpeur explosif. Puis il y a eu une nouvelle série de chutes, pour la deuxième ou troisième année consécutive. Comment tu vis ça et comment expliques-tu ce nombre de chutes ?

C’est sûr que j’ai eu pas mal de malchance. Sur la deuxième chute, je me casse la main. Aux Strade, c’est un peu entre les deux : le mauvais endroit au mauvais moment, et une situation où je n’ai pas pu m’arrêter. Sur le Giro, en revanche, c’est clairement ma faute, je fais totalement l’erreur.

Ces chutes ont amené beaucoup de frustration, parce que la saison avait vraiment bien débuté. Elles ont aussi entraîné une grosse perte de volume. Pour revenir à un bon niveau, les intensités comptent, mais le volume est essentiel, et c’est là que ça a manqué. C’est pour ça que la saison a été compliquée dans l’ensemble.


Tu avais tenté de reprendre aux Strade et sur Tirreno, avant d’abandonner puis d’enchaîner avec le Tour de Romandie. À partir de là, tu n’as jamais vraiment réussi à te relancer. C’était physique ou mental ?

Ce n’était pas mental. Je suis resté presque trois semaines sur la touche avec la main cassée, et ça a énormément retardé la préparation du Giro. J’ai quand même voulu tenter d’y aller, mais ça passait par un stage très court et très intense, puis un Tour de Romandie lui aussi très intense, avant d’enchaîner directement avec le Giro. Au final, j’avais perdu un énorme bloc de volume que j’avais construit depuis le début de l’année. Et en plus, il y a eu la chute sur le Giro. Donc ça n’a vraiment pas tenu. Je suis reparti de zéro.


On pouvait pourtant être optimiste avant la Vuelta, notamment parce qu’en 2024 tu avais réussi à monter en puissance sur la troisième semaine. Qu’est-ce qui a changé en 2025 ?

En 2024, j’avais un Tour de France dans les jambes un mois avant la Vuelta. J’avais bien récupéré et je repartais sur une pente ascendante, ça change tout. En 2025, c’était totalement différent. Je sortais d’un stage en altitude, et ce n’était pas très encourageant de quitter ce stage pour aller courir le Tour de l’Ain.

Malgré tout, ça a fonctionné pendant deux ou trois jours sur la Vuelta. J’arrive à gagner et à prendre le maillot rouge. Je me sentais bien mais derrière, ça n’a pas tenu sur la durée. Encore une fois, c’est le manque de volume qui n’a pas permis d’encaisser la suite de la Vuelta. D'où l'importance d'éviter les problèmes durant la préparation.


Comment se passe ta reprise cet hiver ? Comparé aux autres années, comment tu te sens ?

Je suis là où j’ai envie d’être. Il y a eu pas mal de changements dans l’équipe, mais j’ai passé un excellent stage. Je ne suis pas tombé malade, je suis rentré voir ma famille pour les fêtes, et je me sens bien.

Toute l’équipe a très bien travaillé, coureurs comme staff. Après, en décembre, les feux sont un peu au vert partout. Le plus dur, c’est de rester en bonne santé et de faire les heures. Maintenant, janvier sera un mois très important.


Vous avez aussi un nouveau vélo cette saison. Quelles sont tes sensations ?

Je ne l’avais pas testé en fin d’année, je le découvre sur ce stage à Calpe. C’est le Filante SR2, clairement plus rapide que le modèle précédent. Il a du rebond, notamment au sprint.

On n’a pas encore grimpé de très longs cols très raides, donc pour juger en pur grimpeur, il faudra attendre. De toute façon, le vrai test reste la course. L’entraînement donne des sensations, mais seule la compétition permet de comparer réellement.


Le nouveau vélo Groupama FDJ
Le nouveau vélo Groupama FDJ Filante SR2

Tes sensations sont donc bonnes pour l’instant ?

Oui. On est en décembre, j’ai fait les volumes que je voulais, je ne suis pas tombé malade, donc tous les feux sont au vert pour continuer la préparation de la meilleure manière possible.


Ton actualité personnelle, c'est évidemment ton changement d’entraîneur. Pourquoi ce choix ?

Avec David, on travaillait ensemble depuis novembre 2016. Je n’avais jamais changé d’entraîneur de toute ma carrière. L’équipe souhaitait que je découvre de nouvelles méthodes, de nouvelles approches.

Avec David, on a très bien pris la décision. Notre relation va bien au-delà du cadre sportif, et ça ne change rien entre nous. C’était surtout pour continuer à progresser et voir de nouvelles choses.


C’est un choix personnel ou celui de l’équipe ?

C’est l’équipe. Il y avait une place vacante dans le pôle entraînement, ils ont fait leur recrutement et m’ont proposé de travailler avec lui. J’ai suivi le mouvement et on a commencé ensemble.


À 29 ans, tu n’es plus le jeune espoir. Tu as désormais un vrai rôle de cadre dans l’équipe. Comment tu le vis ?

Avec l’expérience vient une forme de sagesse. Les jeunes arrivent parfois avec beaucoup d’insouciance, ce qui est une bonne chose. Ils ne se rendent pas toujours compte de ce qu’ils réalisent.

Quand un Brieuc Rolland fait troisième d’une étape pour son premier GT, pour sa première année pro, c’est énorme. Je crois qu'il ne s'est pas rendu compte sur le moment, quand il fait troisième de l'étape derrière Ayuso et Roméo, que ce qu'il vient de faire l'est. On est tellement dans un monde stigmatisé par les nouvelles stars hyper jeunes, comme il y a eu pour Remco et Pogacar, qu'on ne se rend plus compte que c'est impressionnant. Faut qu'ils profitent tous de ce genre de performances. Parfois, ils sont déçus, alors il faut leur faire comprendre à quel point c’est exceptionnel. Cette frustration peut aussi les aider à viser plus haut. Pour mon premier GT, j'ai dû faire un seul top 10 et c'est tout.


Mais tu parles de ta jeunesse, est-ce que toi tu t'étais rendu compte de ta performance sur la Flèche Wallonne ? Avec Valverde qui prend ta roue?

Oui ahah car j'ai pu enchainer quelques performances par la suite et puis on m'en a beaucoup parlé. C'est d'ailleurs la que c'est le plus dur, quand on s'en rend compte car on se met forcément des objectifs plus haut par la suite. Le plus dur c'est de confirmer derrière car la pression augmente.


David Gaudu sur la Flèche Wallonne 2017, devant le futur vainqueur (Valverde)
David Gaudu sur la Flèche Wallonne 2017, devant le futur vainqueur (Valverde)

Donc tu te reconnais dans ce rôle de grand frère ?

Oui. Je sais que les jeunes m’observent, surtout dans ma manière de courir, de me placer, de gérer la course. C’est là que j’exerce le plus mon leadership. Et dans le vélo, c’est toujours du donnant-donnant.


Moi, je suis quelqu'un qui ne parle pas beaucoup dans le bus, je ne suis pas un leader qui parle énormément. Je suis quelqu'un de réservé. Les jeunes, ils rigolent, ils ont un truc que je n'ai pas au final, de mettre de l'ambiance et j'adore être en leur compagnie. Je rigole et ça me détend. Et après, quand on est sur le vélo, je sais qu'ils vont me regarder, qu'ils vont voir ce que je fais et qu'ils vont prendre des notes. C'est du donnant-donnant comme je le disais précédemment.


Franchement, je l'ai vu même avec Thibaut un jour sur Milan Turin, on passe la première ascension Superga et il me dit "David, je ne suis pas bien, vasy". Ça me permet d'aller faire cinquième ou sixième de mon premier Milan Turin. Un très grand résultat pour moi à l'époque.


En parlant de grand frère, vous avez perdu un membre important, Stefan Kung, qui en plus était un excellent rouleur. Or, il va y avoir beaucoup de chronos par équipe cette année, dont un sur le Tour. Quel est ton ressenti par rapport à ce départ?

Les départs dans une équipe sont monnaies courantes. Cela a fait partie de la vie d’une équipe. Stefan nous a beaucoup apporté et sa connaissance du CLM c'était une vraie force mais les coureurs qui sont arrivés bonifient l’effectif et désormais c’est avec ce collectif 2026 qu’on doit performer. Et on y arrivera j'en suis certains.


Le Tour de France est souvent au centre des critiques te concernant. Comment tu vis ce rapport avec le public français ?

Il y aura toujours des critiques. On ne peut pas plaire à tout le monde. Le Tour reste la plus grande course du monde, et pour une équipe française, c’est normal d’aligner les meilleurs.

Quand tu fais partie des coureurs capables de viser un top 10 au général, c’est logique qu’on te demande de jouer ce rôle. Et oui, ça me plaît, parce que ce sont les classements généraux qui m’ont toujours fait vibrer. C'est dans ma nature.



Certains pensent que tu pourrais viser davantage les monuments ou les courses punchy. Qu’en penses-tu ?

Gagner des étapes aujourd’hui est très compliqué, surtout en montagne sur les GT. Le seul moyen pour moi, ce sont les étapes de montagne, mais quand Pogacar en gagne la majorité, les opportunités sont rares. Et puis, dans l’équipe, on a aussi des coureurs capables de gagner en one-shot avec Romain ou Val par exemple. Moi et Guillaume sommes parmi les seuls à pouvoir viser un top 10 sur un grand tour. Donc finalement, c'est la qu'on peut le plus apporter. De plus, les points d'un top 10 peuvent parfois rapporter plus qu’une victoire d’étape, et ça cela compte aussi dans le cyclisme actuel.


Tu as déjà brillé sur les classiques ardennaises. Est-ce que ça te manque ?

J’ai déjà fait podium à Liège et top 10 à la Flèche. Ce sont des courses magnifiques. Mais aujourd’hui, je réfléchis aussi collectivement. Parfois, il vaut mieux renforcer un leader sur une classique plutôt que multiplier les cartes. Quand tu as sur les Ardennaises un groupe avec déjà Romain Grégoire, Valentin Madouas ou Guillaume Martin, et bien c'est peut être mieux de répartir les forces en allant sur le Tour de Romandie d'un point de vu "équipe". Cela permettra à Romain d'avoir un équipier supplémentaire par exemple pour le placer et le protéger.

Et puis il y a le Tour de Lombardie, où je n’ai jamais fait podium. C’est un monument qui correspond très bien à mon profil de grimpeur puncheur et sur lequel j’aimerais vraiment me focaliser. J'ai déjà fais deux top 10 là bas et je pense qu'on est moins dans l'équipe à pouvoir faire un résultat du côté du lac de Côme.


Si tu devais choisir une grande performance avant la fin de ta carrière ?

Un podium sur un grand tour. Je n’ai jamais été un grand gagnant. J’ai remporté de belles courses, mais je n’ai jamais enchaîné les victoires. J’ai toujours été quelqu’un de placé, même chez les jeunes. C’est comme ça que je me définis. C'est d'ailleurs sûrement pour cela que je préfère jouer les classements généraux, c'est lier. Je n'étais pas très rapide non plus donc cela n'aidait pas même si j'ai bossé ce côté depuis. Mais quoiqu'il arrive, je reste un coureur placé plus qu'un vainqueur né.


Merci à David Gaudu et à la Groupama FDJ United pour l'interview.





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