Louis Barré (Intermarché Wanty) : « Le Championnat de France je l'ai dans la tête »
- Thibaud Chambre
- il y a 2 jours
- 6 min de lecture
Sixième de l’Amstel Gold Race et auteur d’un très beau Dauphiné, le puncheur d'Intermarché-Wanty Louis Barré participera à son premier Tour de France. A 25 ans, il est en pleine possession de ses moyens et espère briller également sur les championnats de France. Entretien.

Louis Barré (Intermarché Wanty) : « Le Championnat de France je l'ai dans la tête »
Tu sors d’un excellent Dauphiné, qui est à l’image de ton début de saison d’un très haut standing, qu’en retiens-tu ?
Surtout, la découverte de la montagne pour moi. En moyenne montagne, je peux suivre les meilleurs… sauf les extraterrestres (Rires). Pour le reste, même en haute montagne, je sais qu’il en manque un petit peu. Mais que je peux être pas mal en échappée. Je sais que j’étais capable de faire des résultats sur certaines étapes, et je l’ai fait. Après l’altitude aussi, ça rassure. Je sais que je peux arriver à être en forme après un stage en altitude.
Oui, le gros test c’était ces deux dernières étapes où tu as chuté au général et où tu as été un peu malchanceux, non ?
Ouais, je retiens surtout l’étape du samedi où ça a roulé vite dès le premier col. Je pense qu’on était 30 au sommet en plus de l’échappée devant. Ensuite, on a fait la Croix de Fer où ça a rallié au pied du col. Puis Visma a accéléré très très fort au sommet. Et là, je retiens qu’on était 12 au sommet et j’y étais. Ça, c’est vraiment top. J’ai juste explosé à 800 mètres et je pensais revenir. Mais je ne suis jamais revenu. Ils ont fait barrage derrière. C’est un peu dommage, parce que je voulais vraiment me tester dans la montée finale, et je n’ai pas pu. Puis après le dimanche, je n’étais pas très bien donc je me suis dit que le général était mort, du coup j’ai fait gruppetto. Mais, j’aurais peut-être dû m’accrocher un peu plus puisqu’au final, je ne suis que 31e sans m’accrocher, en pensant que que déjà de gros écarts étaient faits.
C’est un peu à l’image des saisons passées où tu avais des résultats probants chez Arkea. Mais c’est sur ta 25e année que l’on t’a véritablement vu exploser. Comment l’expliques-tu ?
C’est simple, j’ai réussi à me fixer des objectifs. J’avais plus de mal avant, c’était compliqué. Le premier objectif, c’est d’être pro. Et une fois que tu passes pro, je n’avais pas trop d’objectifs. Là j’ai réussi à m’en fixer, à me remotiver. Et ensuite, j’ai changé d’équipe. J’ai un programme de course qui me va à la perfection et je ne cours pas plus qu’il ne faut. La performance d’équipe est pas mal. Tout se passe bien.
On te voit t’exprimer sur des profils exigeants. En explorant tes fichiers Strava, on peut voir que tu es un coureur « à la Derek Gee », qui va très loin dans la douleur, un peu comme le montre ta montée de La Redoute. Que peux-tu nous dire de toi et de ton profil ?
Mon profil est plutôt puncheur, parce qu’un Derek Gee est plus grimpeur que moi quand même. C’est vrai que quand je suis vraiment bien, j’arrive à aller très loin dans la douleur. Ça me motive encore plus d’avoir des bonnes jambes. Sur des efforts comme La Redoute, c’est des efforts qui me conviennent à la perfection et faire une montée comme j’ai fait, faut le faire aussi en course après 200 kilomètres. J’aime les courses longues où j’arrive à faire des bons efforts au bout de 5-6h de course.
En parlant de courses longues, tu vas t’aligner prochainement sur les Championnats de France, où tu seras assurément un des outsiders à observer. Comment abordes-tu ce circuit piégeux des Herbiers ?
Beaucoup d’envie, je l’ai dans la tête. Je sais que c’est un circuit pour puncheur. Après, un championnat de France est toujours très spécial. Tu as des équipes qui sont 15-20. Nous, on ne sera que 4, il faudra bien courir et ne pas se faire avoir par des coups qui peuvent aller peut-être très loin. C’est un circuit très ouvert, pas mal de profils peuvent gagner, ce qui est très bien pour le public. Après c’est une course très longue donc il faudra être costaud.
Et puis, c’est un circuit piégeux. Même si vous n’êtes que quatre, on va dire qu’on a déjà vu des coureurs comme Julien Bernard qui a fait deux podiums, les Quick-Step qui ont remporté plusieurs titres alors qu’ils étaient sous-représentés. Ça te donne quand même des motifs d’espoirs ?
Oui carrément ! On n’a pas à prendre la course à notre compte. Ce sera aux autres équipes de le faire, si elles sont piégées. Ça peut être un avantage. Faut pas que ce soit un inconvénient pendant la course, faut pas prendre la course à contre-pied. Après j’ai reçu des messages de Jérome Pineau, qui me disait que ça peut être un gros avantage d’être en petit nombre au départ. Mais il m’a aussi dit qu’il faut courir à la perfection. Je vais essayer de faire ça, parce que je sais que c’est une course qui peut bien me convenir et le maillot de Champion de France fait rêver. C’est un gros objectif.
Un maillot que tu pourrais éventuellement porter sur le Tour de France, quels y seront tes objectifs personnels ? On sait désormais que sur les Grands Tours, il faut choisir ses moments, as-tu déjà ciblé les tiens ?
Oui, oui, j’ai ciblé quelques étapes. Une en Normandie, à Vire. Après Mûr-de-Bretagne, le lendemain. Sur le papier, c’est celles qui me conviennent le mieux. Après ça sera des étapes plutôt en échappée. Massif Central et Pyrénées, ça me convient le mieux. Les Alpes, les cols sont plutôt longs. L’avant-dernière étape aussi à Pontarlier. Y aura des choses à faire en 21 étapes. Il y a toujours des ouvertures.
Après j’ai un objectif, c’est Montréal, au Canada. C’est une de mes courses préférées.
Pour la suite de la saison déjà couronnée de succès par ta très belle progression, quels seront tes objectifs ? Et en se projetant plus loin, quels sont tes objectifs à plus ou moins long terme ?
Mes objectifs déjà : Championnats de France et Tour de France. Ensuite, je ferais San Sebastian donc à voir suivant la forme après le Tour. Je ne sais pas trop comment je sortirais du Tour de France. Après j’ai un objectif, c’est Montréal, au Canada. C’est une de mes courses préférées. Gros objectif pour moi. Et puis après les courses en Italie, dont certaines me conviennent vraiment bien. Je pense à Varesine que j’aime bien. Et j’espère découvrir l’équipe de France, ça pourrait être super. Je sais que le Championnat d’Europe me convient pas trop mal. Le Rwanda, le championnat du monde, à voir. J’ai aucune idée là-dessus. A plus long terme, c’est de gagner le plus de courses possible et surtout gagner une première course (rires). Je n’ai pas encore gagné chez les professionnels. Si je vois l’année prochaine, je pense au Mondial qui est à Montréal. Je vais redire Montréal, mais j’adore ce circuit. J’y pense aussi.
On s’est concentré sur ta personne, mais il y a aussi un environnement. Tu es lié à Intermarché-Wanty jusqu’en 2026. Penses-tu que l’équipe est parfaite pour progresser ?
Souvent les coureurs qui viennent ici le disent, c’est la bonne équipe pour avoir une bonne progression, avec un bon programme adapté et la performance qu’on arrive à faire avec le budget qu’on a et ce qu’on arrive à faire, c’est vraiment énorme. C’est un atout pour les coureurs qui viennent dans l’équipe.
Tu vois une petite marge de progression, avec ce gap de budget que certains coureurs mettent en avant. On l’a vu récemment avec la déclaration de Kévin Vauquelin, à la sortie du contre-la-montre du Tour de Suisse.
J’ai bien aimé son interview. Ouais, c’était top ce qu’il a dit. C’est tout à fait ça. On ne peut pas rivaliser non plus avec les meilleures équipes du monde, qui ont un meilleur budget, qui courent beaucoup moins que nous, qui font beaucoup plus de stages que nous. Mais avec nos moyens, on ne peut pas faire beaucoup mieux. Une équipe comme Intermarché, on peut avoir l’opportunité d’être leader. Ça joue beaucoup pour la progression, prendre confiance et faire des résultats. Savoir à quel niveau on peut jouer au niveau mondial. Si on est cantonné au rôle d’équipier, on ne peut pas savoir où est notre limite. Si on ne l’a jamais exploré. C’est bien de pouvoir l’explorer avec Intermarché.
A date, l’équipe est dans une situation d’équilibriste. Vous êtes en ballottage favorable, mais vous restez sous la menace d’une possible relégation, si la fin de saison venait à se compliquer. Sentez-vous cette menace ? Est-ce une pression ?
Oui, il y a forcément la menace des équipes qui marquent beaucoup de points. C’est serré au bout de trois ans. Nous, on essaye de faire du mieux qu’on peut, à chaque course, sans penser à ça, parce qu’il n’y a pas que ça qui compte. Tout le monde essaye de faire le maximum pour faire des résultats.
Vous n’avez pas forcément adapté les stratégies de course en fonction ?
Non, non. On reste sur le plan. On essaye de le suivre. Pour l’instant, pour moi, ça marche très bien. Pour l’équipe, certains coureurs ont plus de mal, mais on est qu’au milieu de saison. Il y a encore du temps pour ceux qui n’ont pas marché.