Lotto – Intermarché Wanty : Décryptage de la possible fusion à venir dans le peloton

Deux ans après le feuilleton de la fusion entre Soudal Quick Step et Jumbo Visma, c’est une nouvelle série qui s’ouvre dans le domaine économique cycliste : celle d’une fusion entre Lotto et Intermarché Wanty. Analyse de cette nouvelle bombe.

Voilà encore une nouvelle qui va occuper en partie l’espace médiatique d’ici la fin de l’année. Alors qu’Arkea B&B Hôtels cherche, en vain, un repreneur sous peine de disparition, que Decathlon a officialisé le remplacement d’AG2R par CMA CGM dès 2026, une autre équipe devrait changer de visage. Ou plutôt, deux équipes. En effet, à la mi-juillet, les médias belges et néerlandais ont annoncé la possible fusion entre la formation World Tour Intermarché Wanty et la Pro Team historique Lotto. L’information n’a pas tardé à être confirmée par les équipes elles-mêmes, notamment Intermarché Wanty, par la voix de son directeur Jean-François Bourlart. « Oui, il n’y a pas de secret, on discute en ce moment sur un rapprochement, déclarait ce dernier à la RTBF. On est dans des négociations exclusives et on veut aboutir des deux côtés. […] Les deux équipes ont la même philosophie et les mêmes valeurs et beaucoup de choses en commun. On veut faire aboutir un projet commun ». Pas de langue de bois ni de démenti, donc la fusion est plus que probable. Mais pourquoi une telle annonce soudaine, le jour même où Bourlart accordait une interview à L’Equipe pour défendre son modèle ? Dans quelles mesures une fusion peut-elle se réaliser ? Quid de l’effectif actuel des deux formations ? Tentatives de réponses.

Le contexte : Lotto propriétaire de la structure, Intermarché Wanty détenue par Bourlart

Avant toute chose, il est important de rappeler le contexte des deux équipes. La Pro Team Lotto est détenue par la Loterie Belge Lotto, qui lui donne son nom depuis 2011, suite à sa recréation après la fin de l’équipe Omega Pharma Lotto. Formation historique et majeure du peloton mondial, l’équipe fonctionne depuis longtemps avec un co-namer pour gonfler son budget et rester dans les meilleures équipes. Les sponsors se sont succédé : Belisol, Soudal puis Dstny. Jusqu’au retrait surprise de ce dernier fin 2024, alors que le patron de la société a fait part de sa déception de la descente de l’équipe en Pro Team fin 2022. Il s’était dit déçu de la relégation et même déclaré que « s’il avait su pour la relégation, il ne se serait pas engagé ». Résultat, Dstny s’est retiré fin 2024, laissant Lotto sans co-namer et avec un budget réduit. Les résultats de 2025, très loin de 2023 et 2024, sont inquiétants et laissent planer le doute sur la capacité des hommes de Stéphane Heulot de se maintenir en World Tour lors du prochain cycle triennal.

De son côté, Intermarché Wanty est une équipe World Team détenue par son directeur, Jean-François Bourlart. Dans son interview à L’Equipe, le Belge se présentait comme le plus petit budget du WT avec 17 M€. Elle est soutenue par deux sponsors de poids, Intermarché depuis 2021, et Wanty, un groupe belge de construction, qui a réaffirmé son engagement en début de saison, en augmentant son apport au budget de 2,5 M€ et affirmé sa volonté de poursuivre l’aventure : « nous espérons pouvoir entamer un nouveau cycle de trois ans à la fin de 2025 », annonçait Benoit Soenen, Administrateur Délégué du Groupe Wanty en janvier. Malgré ces partenariats solides, Bourlart sait que 17 M€ sont peu face aux autres équipes, ce qui se reflète au classement : malgré une grosse saison 2023, Intermarché Wanty pointe à la 17^e place UCI sur 3 ans et donc menacée par une potentielle descente. Si les Belges ont un certain matelas d’avance (1600 points), l’avenir peut se compromettre rapidement face aux Pro Teams comme Tudor, Q36.5 ou Uno-X Mobility.

Si Fusion, Lotto rachèterait Intermarché Wanty

C’est dans ce contexte qu’arrive ce projet de fusion. D’après des informations de Veloclub.net, l’instigateur de ce projet serait le management de l’équipe Intermarché Wanty. Les raisons sont multiples, mais ont déjà été évoquées : unir les forces de deux équipes historiques belges pour continuer d’exister au plus haut niveau. Sur le papier, c’est alléchant, mais dans les faits, comment ferait-on ?

Si l’on s’intéresse à la nature des structures juridiques, le scénario le plus crédible serait le rachat par Lotto, qui dispose de la surface financière de la loterie belge, de Continuum Sport LLC, la structure juridique d’Intermarché Wanty. Il s’agirait alors d’une fusion / acquisition des plus classiques, avec l’absorption d’une société par une autre, visant à mutualiser diverses départements - administratifs notamment.

L’autre cas de figure serait une dissolution complète des deux structures pour en créer une nouvelle en commun. Cette option est également envisageable pour repartir à 50/50 entre les deux équipes actuelles. Dans les deux cas, il faudrait que les discussions s’accélèrent, car ce processus demande du temps, et compte tenu du calendrier d’enregistrement à l’UCI, ainsi que la mise en place de tous les aspects juridiques, les deux formations devraient se fixer d’ici fin septembre.

Dans tous les cas, plusieurs questions demeurent. Quel serait le budget de la nouvelle équipe ? Probablement autour des 25-30 M€, si les trois partenaires majeurs (Lotto, Intermarché et Wanty) poursuivent l’aventure. Quid des salariés des deux structures ? Une fusion laisserait très certainement beaucoup de monde sur le carreau, du staff au personnel administratif jusqu’aux coureurs.

Quel effectif pour la future équipe ?

On en vient donc à la question de l’effectif. Une équipe World Tour ne peut compter que 30 coureurs maximum. Or, sur la base des contrats en cours, Lotto comptera 17 coureurs, et Intermarché Wanty 21, soit un total de 38 coureurs. 8 devront donc quitter l’effectif. Mais qui ?

Un premier élément de réponse sera donné par les deux cas de fusion évoqués précédemment : si Lotto rachète Intermarché, alors il y a fort à parier que les 8 perdants se trouvent du côté d’Intermarché, qui se verra « découpé » pour être mieux intégré à la structure Lotto. En revanche, dans le cas du scénario 2, alors tous les contrats actuels des deux équipes seraient rompues, et la structure nouvellement créée serait libre de recruter qui elle veut selon négociation. Il serait même envisageable de voir des coureurs d’autres équipes rejoindre cette nouvelle Lotto-Intermarché-Wanty. L’incertitude demeure, mais voici un exemple d’effectif que l’on pourrait imaginer sur la base des contrats actifs en 2026 :

Mais l’effectif professionnel masculin n’est pas la seule interrogation : si seule Lotto dispose d’une équipe féminine, les deux structures ont leur propre équipe de développement. Qu’en sera-t-il ? Ce dossier est rempli de questions auxquelles nous n’avons pas encore de réponses. Une d’elle est notamment de s’interroger sur la véracité de toutes ces informations : la fusion se fera-t-elle vraiment ? Est-elle vraiment voulue par les deux parties ? D’après plusieurs médias, c’est la Loterie belge qui aurait diffusé l’information. Dans quel but ? Lotto cherche-t-elle vraiment la fusion ? Nous essaierons encore d’en donner, dans les prochains mois, en espérant le dénouement le plus positif pour toutes les parties concernées