Decathlon - L’Oréal, décryptage d’un mariage raté
- Romain Bougourd
- il y a 6 jours
- 4 min de lecture
Si l’annonce de la venue de L’Oréal comme co-sponsor de l’équipe Decathlon AG2R La Mondiale a secoué la planète cyclisme, elle a aussitôt été démentie par l’équipe. Pour autant, Vélofuté a essayé de décrypter cette information : AG2R La Mondiale veut-elle quitter l’équipe ? L’Oréal a-t-il réellement été intéressé ? Pourquoi cela a échoué ? Tentatives de réponses.

L’annonce a fait son effet dans l’écosystème cycliste. Le 11 juin dernier, Le Télégramme annonçait que le groupe français de cosmétiques L’Oréal allait rejoindre l’équipe Decathlon AG2R La Mondiale Team en tant que co-sponsor en lieu et place de la compagnie d’assurance, dès 2026. Une information démentie quelques heures plus tard par l’équipe puis par le groupe dans L’Equipe et Ouest France. Et nous sommes en mesure de confirmer que ce mariage alléchant, entre le leader français des équipements sportifs (14 Milliards de chiffre d’affaires en 2024) et le leader mondial de la cosmétique (43 milliards de CA en 2024), ne va pas se faire. Nous allons tenter, dans cet article, de répondre à plusieurs questions : AG2R La Mondiale veut-elle vraiment se retirer du cyclisme après 30 ans de sponsoring et 3 ans après avoir racheté la structure ? Pourquoi ? L’Oréal a-t-il vraiment songé rejoindre la structure ? Pour quelles raisons ce mariage a échoué ? Décryptage.
Le contexte : AG2R La Mondiale est propriétaire de l’équipe
D’abord, posons les bases. La compagnie d’assurance AG2R La Mondiale est un acteur de premier plan du cyclisme professionnel, puisqu’elle est le sponsor principal de l’équipe savoyarde depuis 2000. Si l’équipe a connu plusieurs noms, AG2R a toujours fait partie de la dénomination, souvent seule. En 2021, elle a été rejointe par Citroën en tant que co-namer, une nouveauté. Et cette nouveauté, accompagnée par l’évolution du cyclisme, a amené la compagnie d’assurance à mener plusieurs études et réflexions internes, portant sur la pertinence et la forme de ce sponsoring. Rappelons que 100% du budget marketing de l’entreprise était consacré au cyclisme, soit une dizaine de millions d’euros. Pour autant, malgré des dizaines d’années de sponsoring, AG2R n’avait pas de pouvoir officiel de décision : l’équipe, dont le nom de la structure juridique est France Cyclisme, était détenue à 100% par son fondateur, Vincent Lavenu.
Les études et réflexions menées en interne ont amené la direction de l’entreprise à une décision clé : racheter France Cyclisme à Vincent Lavenu, afin de mener des transformations majeures et d’avoir la pleine maîtrise des opérations. Chose faite en juin 2022, comme nous l’annoncions fin 2023. AG2R La Mondiale est depuis le seul maître à bord.
AG2R La Mondiale veut-elle s’en aller ? Pourquoi ?
Bien que désormais propriétaire de la structure juridique, AG2R n'est plus le premier "namer" de l'équipe. Ce qui peut être le signe d'un désengagement futur. Et d'après les indications publiques et dont nous disposons, il semblerait que la société envisage de se retirer fin 2025. Après avoir mené à bien une transformation de l'équipe en profondeur depuis 2022, l'assureur a remis l'équipe sur de bons rails. Le moment semble donc opportun pour, probablement, remettre en question la suite de sa collaboration et de laisser la place à un nouveau partenaire de premier plan.
En 2023, sur la base des informations dont on dispose, le seul accord qui a été signé concerne le sponsoring, mais rien en termes d'actionnariat. A ce jour, Decathlon n'est pas entré au capital de la structure. Pourtant, il semblerait que Decathlon ait repris les rênes de l’équipe et que le passage de relais ait déjà eu lieu dans les opérations. Les Nordistes seraient même actifs dans la recherche d'un co-sponsor pour remplacer AG2R. L’équipementier deviendra-t-il actionnaire de l’équipe à l'avenir ? Ce n’est pas à exclure.
L’Oréal veut-il investir dans le sport et le cyclisme ?
C’est dans ce contexte qu’intervient L’Oréal. Jusque-là, le nom de L’Oréal n’est jamais vraiment ressorti dans ce type de feuilleton. En tant qu’acteur majeur des cosmétiques, shampoing et produits beauté, le lien avec le cyclisme n’est pas évident [Alpecin est certes une marque de shampoing mais axé sur les hommes et contre la chute de cheveux, loin du positionnement de L'Oréal, ndlr]. En réalité, le lien pourrait tenir à la volonté d’un homme : Nicolas Hiéronimus. Le PDG du grand groupe, nommé en 2021, est en effet un féru de cyclisme et un grand amoureux du Tour de France, en témoignent ses nombreux posts et articles publiés sur son compte LinkedIn ces dernières années. Une passion qui pourrait nourrir un projet de sponsoring dans le cyclisme.
Car comme l’a annoncé Le Télégramme, et que nous sommes capables de confirmer, des négociations ont bien eu lieu entre l’équipe française et L’Oréal. Mais comme annoncé en début d’article : elles sont tombées à l’eau au mois de mai. On peut donc l’avancer avec quasi-certitude (ne jamais dire jamais) : L’Oréal ne sera pas co-sponsor de l’équipe aux côtés de Decathlon.
Decathlon L’Oréal : Pourquoi ce dossier est terminé ?
Alors, pourquoi cette décision ? Bien sûr, nous ne disposons pas de cette information, mais nous pouvons émettre quelques hypothèses. Le public cible du cyclisme n’est peut-être pas suffisamment proche de celui de L’Oréal ? La firme française n’a peut-être pas une culture du sponsoring sportif correspondant à ce sport [l’entreprise est active dans la voile, ou certains sports féminins, ndlr] ? Les arguments avancés par Decathlon n’étaient pas suffisamment convaincants ? Nous tenterons d’apporter, à l’avenir, davantage d’éléments pour expliquer cette décision.
Quoiqu’il en soit, Decathlon se retrouve donc dans une situation peu agréable, propre au cyclisme. Si AG2R souhaite effectivement se retire fin 2025, l’équipementier sportif doit donc trouver un partenaire de premier plan rapidement pour l’accompagner dans son projet ambitieux : construire une équipe du top 5 mondial capable de jouer la victoire sur les Grands Tours. Avec en son sein le crack générationnel Paul Seixas, l’équipe a de beaux arguments. Reste à transformer l’essai. Feuilleton à suivre…
Beaucoup de zones d'incertitudes. C'est bien d'essayer de voir de l'autre coté .Merci . A suivre donc 👍😀